Je viens d’apprendre que j’ai une rupture totale de mon ligament croisé (LCA)

Le diagnostic a été évoqué par votre médecin du sport ou déjà confirmé par l’IRM, il n’est pas urgent de prendre une décision chirurgicale. Les trois premières semaines vous êtes immobilisé dans une attelle non articulée, à 20° de flexion, vous appliquez de la glace 30 minutes 3 fois par jour, vous avez le droit de poser le pied par terre. Les semaines suivantes vous retrouvez une marche normale, sans attelle. Le kinésithérapeute vous aide dans cette voie, vous redonne un peu de tonus musculaire et de mobilité. Quand le genou est indolore et souple vous prenez rendez-vous avec votre médecin du sport ou un chirurgien du sport pour envisager l’avenir.

De quoi vais-je me plaindre avec mon genou privé de son ligament croisé (LCA) ?

2 définitions avant de continuer :

  • L’instabilité est la sensation de déboîtement que vous pouvez ressentir dans votre genou.
  • La laxité est le jeu anormal constaté par le médecin lors de l’examen clinique de votre genou. La laxité peut être mesurée instrumentalement en radiologie (TELOS) ou en cabinet de consultation (arthrométre).

Vous risquez de vous plaindre d’instabilité, pasdans la vie courante sauf rotations (danse du samedi soir…), pas dans les sports en ligne (course à pied, vélo, natation battement de pied…) mais dans les sports avec pivot ou contact (football, ski, tennis, judo…).

Vous risquez de vous plaindre de douleur, pas tout de suite, sinon il faut consulter votre médecin, mais à long terme, pourquoi ?

Parce que l’évolution naturelle d’un genou privé de son LCA vers des lésions méniscales secondaires et l’arthrose est inévitable. Même en l’absence d’instabilité, la subluxation antérieure répétée du tibia sous le fémur (laxité) entraîne :

  • Une détente progressive des éléments de maintien du genou (capsule et ligaments)
  • Des lésions méniscales et chondrales (cartilage) par cisaillement, quasi constantes à 10 ans, invalidantes après 25 à 30 ans d’évolution (arthrose). Vous pouvez alors vous plaindre de douleurs, d’instabilité, d’épanchements, de blocage.

On m’a parlé d’une lésion partielle, éventuellement cicatrisable du LCA !

Certains signes cliniques et d’imagerie nous donnent un petit espoir de cicatrisation: l’absence de sensation de déboîtement initial, l’absence de gonflement initial, des tests de laxité peu marqués, un aspect IRM de LCA tendu et vertical. Ce tableau justifie particulièrement l’immobilisation initiale, l’absence de précipitation vers la réparation chirurgicale, et la répétition de l’examen clinique sur le genou « refroidi », entre 6 semaines et 2 mois après l’accident. Le médecin peut, s’il le juge nécessaire, mesurer la laxité (arthromètre ou TELOS) ou demander une IRM de contrôle. Par contre, quel que soit l’aspect IRM du LCA, si les tests de laxité sont francs la conduite thérapeutique est la même que dans la rupture totale.

La rupture totale du ligament croisé (LCA )est certaine, est-il conseillé de me faire opérer ?

L’histoire naturelle d’un genou privé de LCA m’incite à simplifier les indications thérapeutiques de la manière suivante :

  • Sujets jeunes, opérer sauf arguments contre la chirurgie
  • Sujet >45 ans, ne pas opérer sauf arguments pour la chirurgie

Arguments contre la chirurgie du genou:

  • Votre genou est stable
  • Les tests de laxité appréciés par votre médecin sont faiblement positifs
  • Vous n’êtes pas motivé, vous acceptez de vous limiter aux sports en ligne: course à pied, vélo, natation battements
  • Vous avez un travail sédentaire

Arguments pour la chirurgie du genou:

  • Vous êtes instable-Les tests de laxité sont francs
  • L’IRM ne laisse aucun doute quant à la rupture totale
  • Vous êtes motivé à conserver les sports avec pivot: foot, ski, tennis…
  • Vous avez un travail très physique

Je ne me fais pas opérer, quelles précautions je dois prendre ?

Vous devez retrouver un genou fort, bien protégé par les structures musculaires qui le protége, le quadriceps et surtout les ischiojambiers. Pour obtenir cela je vous conseille :

  • Une rééducation bien conduite, avec un test isocinétique (test d’évaluation de la force musculaire) en fin de rééducation
  • Une réadaptation progressive au sport en commençant par la musculation et les sports en ligne
  • Un entretien physique régulier, pluri hebdomadaire
  • Eventuellement une genouillère dans les sports avec pivot ou contact.

A la moindre plainte : douleur, gonflement à l’effort ou instabilité, consulter votre médecin du sport.

Au total : le médecin informe, le patient dispose.

Docteur Yves GUGLIELMETTI. – 28 janvier 2014.