Anatomie et biomécanique du ligament croisé antérieur ( LCA : ligament double faisceau )

ANATOMIE DESCRIPTIVE DU LIGAMENT CROISÉ ANTERIEUR EXTERNE

Le LCAE est le seul ligament de l’organisme purement intra articulaire

INSERTIONS DU LIGAMENT CROISÉ ANTERIEUR EXTERNE

Au niveau du tibia, le LCAE s’insère sur la surface pré-spinale, en avant des épines tibiales, en arrière de la corne antérieure du ménisque médial. Cette zone d’insertion est à la fois osseuse et périostée, d’une surface d’aspect triangulaire dans le plan horizontal de 2,5 à 3 cm².
Au niveau du fémur, le LCAE s’insère sur la face axiale du condyle fémoral latéral selon un axe sensiblement vertical, très postérieur en forme de haricot avec un bord antérieur rectiligne d’une surface d’environ 2 cm².
L’insertion tibiale est plus étendue que l’insertion fémoral : le LCAE s’élargit de fémoral en tibial et présente une torsion de ses fibres. Cette torsion permet au bord antérieur du LCAE d’être rectiligne et concave vers le haut échappant ainsi au bord antérieur de l’échancrure intercondylienne en extension totale.

CONSTITUTION DU LIGAMENT CROISÉ ANTERIEUR EXTERNE

Le LCAE est formé de plusieurs faisceaux de fibres dont les deux plus importants sont le faisceau antéro-médial et le faisceau postéro-latéral (par rapport à leur insertion tibiale).

Le faisceau antéro-médial (insertion tibial antérieure et médiale, insertion fémorale haute et postérieure) est défini de telle façon que ses fibres tibiales les plus antérieures deviennent les plus postérieures sur le fémur (longueur moyenne de 3,3 cm).

Le faisceau postéro-latéral a une insertion tibiale en arrière et en dehors du faisceau antéro-médial; plus court et plus vertical il s’insère plus bas sur la face axiale du condyle externe.

Cette disposition (en fait encore plus complexe) explique la torsion des fibres du LCAE lors des mouvements de flexion extension avec recrutement en tension de certaines fibres au cours des mouvements de flexion extension. Ainsi, lors de la manœuvre de Lachman, c’est le faisceau antéro-médial qui est mis en tension principalement.

DIRECTION ET TENSION DU LIGAMENT CROISÉ ANTERIEUR EXTERNE

La direction et la tension du LCAE dépendent du degré de flexion du genou

GENOU EN EXTENSION, le LCAE vertical vient au contact de l’échancrure intercondylienne. Les 2 faisceaux principaux sont tendus.
L’hyper extension et le recurvatum accentuent la tension sur ces 2 faisceaux.

GENOU EN FLEXION, le LCAE devient horizontal. Sa tension varie selon le contingent de fibres considéré. Le faisceau antéro-médial se relache, le faisceau postéro-latéral reste tendu. En hyper flexion, les 2 faisceaux se retendent.

ANATOMIE FONCTIONNELLE

La distance séparant le centre des deux insertions tibiale et fémorale du LCAE reste constante quelle que soit le degré de flexion du genou ce qui définit l’isométrie.

Au cours de la flexion le LCAE subit une torsion axiale de 90° entre 0 et 90° ce qui entraîne en fait une variation de tension et de longueur des différentes fibres du LCAE, ce qui explique la difficulté d’une reconstruction anatomique du LCAE par greffe

En fait, le système ligamentaire du pivot central du genou est assimilé à un système de 4 barres liées. Pour faciliter l’analyse, au niveau de chaque ligament existe une « fibre neutre » dont la longueur reste constante quelle que soit la position du genou (fibre isométrique), le centre instantané de l’articulation et l’axe de flexion se situe à l’intersection de ces fibres neutres quelle que soit la position du genou.
Toutes les fibres situées en avant de ces fibres neutres sont tendues lors de la flexion, à l’opposé des fibres situées en arrière de ces fibres neutres sont distendues. 

Compte tenu de la torsion du LCAE en flexion, les fibres antéro-médiales tendues en extension se retrouvent postérieures sur le fémur en flexion et donc détendues à l’opposé de fibres postero-latérales.

Cette meilleure connaissance anatomo-fonctionnelle explique les progrès de la chirurgie du LCAE ; le respect de l’isométrie reste une notion fondamentale, à condition qu’elle aille de pair avec un positionnement anatomique de la greffe, restaurant une cinétique normale de l’articulation dans les trois plans de l’espace.

COMPORTEMENT EN TRACTION

Le comportement en traction des ligaments résulte de leur structure collagénique.

En absence de charge, les fibres collagéniques ont un aspect ondulé.
Cet aspect ondulé disparaît lors de la mise en charge du ligament sans modification initiale de sa longueur, et ce n’est qu’au moment où la charge atteint un certain niveau que les fibres s’allongent (charge élastique), ce qui correspond à un allongement du ligament d’environ 4%. Si la charge augmente elle atteint alors un niveau de rupture (charge de rupture) où les fibres se déchirent. 

COMPORTEMENT VISCO ELASTIQUE

Les fibres collagènes sont entourées d’une substance fondamentale et faiblement liées les unes aux autres.

Cette structure explique que le comportement charge-déformation dépend de la vitesse d’application de la charge. De façon imagée, il est plus facile de se déplacer lentement que rapidement dans un liquide visqueux.

Lorsqu’une mise en charge rapide est appliquée, le ligament a tendance à se rompre au milieu alors qu’en cas de charge lente, il se détachera plus facilement prés ou au niveau de son avulsion osseuse.

De plus, en cas d’application d’une charge répétée supérieure à la charge élastique mais inférieure à la charge de rupture, le ligament peut fluer c’
De plus, en cas d’application d’une charge répétée supérieure à la charge élastique mais inférieure à la charge de rupture, le ligament peut fluer c’est-à-dire s’allonger et perdre ses propriétés mécaniques progressivement avec le temps pour aboutir à une rupture de fatigue (ou transformation fibreuse sans valeur fonctionnelle).
Ce phénomène est très important pour les greffes ligamentaires, (le tissu greffé est plus vulnérable que le tissu ligamentaire normal au fluage surtout pendant la phase de maturation de la greffe). Cela explique la détente progressive d’une greffe avec le temps, surtout si ces sites d’insertion ne sont pas en position anatomique. 

FREIN PRIMAIRE ET SECONDAIRES

Un frein primaire est un ligament qui résiste à l’essentiel de la charge qui tend à déplacer une pièce osseuse l’une par rapport à l’autre.
Un ligament frein primaire est celui qui est orienté le plus parallèlement possible à la direction de la force appliquée. Un frein secondaire est moins bien aligné pour s’opposer à la charge
Au niveau du genou, pour différentes positions et pour un déplacement donné la répartition des charges entre frein primaire et freins secondaires est variable.
Au début de la flexion, le LCAE est bien orienté pour s’opposer à une force de tiroir antérieur, le PAPI apparaissant comme un frein secondaire.
En cas de lésion du LCAE, les freins secondaires sont alors plus sollicités ce qui explique leur détente secondaire en cas de lésion initiale non traitée.

Docteur Serge HERMAN, Docteur Nicolas LEFEVRE, Docteur Yoann BOHU. – 13 février 2012.